Comment "prendre soin" au masculin ?
Et pourquoi les mecs ont tant de mal à *prendre soin* ?
Salut toi ! J’espère que tu te portes bien :)
Avant d’aller plus loin, petite promo podcasts :
À écouter dans mes podcasts :
Mario, papa à 15 ans de jumeaux en Colombie #BestOf (Darons)
Antoine Officieux, ou comment grandir sans avoir honte de ses émotions (Mecs)
Quid d'ignorer Yann Moix forever ? #HotTake (Fab & Mymy Show)
J’en ai parlé dans Le Fab & Mymy Show il y a quelques semaines, mais je me retrouve depuis quelques mois dans un parcours du combattant pour faire des exams en tous genres autour de mon cœur.
Rien de très grave a priori, sans doute un cardiologue un peu zélé mais j’ai des tas de scanners / IRM en tous genres à faire pour vérifier que la machine tourne correctement.
Qui dit scanner et IRM dit PIQÛRES, pour me faire passer leur fameux fluide dans le sang qui donne chaud dans tout le corps (la sensation est particulière, notamment au niveau de l’appareil génital n’est-ce-pas).
L’autre jour, je suis tombé sur deux infirmiers pour me poser tout ce barda et suite à cette interaction, m’est venue une opinion :
Décidément, les gars ont du mal à prendre soin.
Oué je sais, c’est pas sorti de la cuisse de Jupiter. C’est sorti de cette société patriarcale à la con, où on apprend aux petites filles à prendre soin de leur poupée dès le plus jeune âge, alors que les garçons se tabassent, ou tabassent leurs Transformers ou leurs Beyblades.
Mais là, c’était si caricatural qu’on aurait dit un cliché.
Là où les infirmières qui se sont occupées de moi dans mes exams précédents ont pris soin de me piquer correctement, ont eu le petit geste sympa quand il a fallu enlever le sparadrap (aïe les poils) et la perfusion (aïe l’aiguille), les deux gars m’ont piqué grossièrement, sans vraiment me prévenir, m’ont fait mal et ont retiré tout le bins en deux coups de cuillère à pot, en me faisant sortir fissa de la pièce, sans même m’indiquer comment revenir à la salle d’attente — j’ai mis 10 bonnes minutes à retrouver mon chemin haha
Mais bon, assez tapé sur les infirmiers, d’autant plus quand on connaît l’état du système de santé dans le public, je trouvais la comparaison femmes / hommes intéressante à analyser.
Et moi, dans tout ça, comment je prends soin ?
C’est assez simple : jusqu’à il y a 2-3 ans, je dirais, j’étais dans le service minimum. Voire même : il n’y avait personne au bout de la ligne, veuillez rappeler ultérieurement.
Pourtant attention, j’étais convaincu que j’étais un mec bien. Et je crois que je l’étais, en grande partie. Par rapport à mon éducation, à l’époque à laquelle je suis né, à mon environnement, je me débrouillais bien. J’arrivais à ne pas faire (trop) de mal aux gens autour de moi, et c’est déjà beaucoup mieux que plein de mecs cishétéro de 40 balais. C’est dire si la barre est putain de basse.
Donc oui, j’essayais du mieux que je pouvais de ne pas faire de mal autour de moi, mais ça s’arrêtait là.
Je crois que j’étais infoutu de prendre soin comme je le fais aujourd’hui, et pire : comme je n’avais pas conscience que c’était possible pour moi de prendre soin, j’étais incapable de vraiment voir quand on prenait soin de moi, de remercier pleinement, d’apprécier totalement les gestes ou les intentions qu’on avait à mon égard (je sais pas si ça te parle, mais le jour où je m’en suis rendu compte, ça m’a 🤯 — saloperie de cercle vicieux).
Et c’était d’autant plus vrai qu’avec une mère “au foyer”, j’ai été élevé comme un petit prince. Ma mère qui s’occupait de moi, qui faisait la popote, qui lavait, pliait et rangeait mon linge, c’était : LA BASE (merci encore Maman pour tout ce que tu as fait pour nous).
Globalement, je ne laissais pas rentrer des masses de trucs en moi. J’en ai parlé dans ce post sur les pleurs.
Pour en arriver là, ça m’a demandé de rajouter une sacrée dose de travail sur moi bien sûr, d’y ajouter de l’empathie, de la conscience de l’autre, d’aller fracasser mes traumas en thérapie, de me débarrasser de la peur du regard de l’autre, puis petit à petit, à faire tomber l’armure, mais aussi de m’autoriser à tout simplement : prendre soin.
C’est pas si facile quand on t’a montré depuis tout petit qu’un mec, ça se bagarre, ça montre ses gros muscles et que c’est les filles qui prennent soin.
Ça m’a aussi aidé d’être dans une relation pendant un an avec une femme qui me répétait à quel point c’était important pour elle de prendre soin. Et qui me disait que c’était comme ça qu’elle attendait d’être aimée en retour.
Et moi, j’étais amoureux d’elle, alors j’ai appris, je l’ai observée, ça m’a aidé de la voir faire pour les autres ou pour moi, de me connecter au plaisir qu’elle y prenait, ça m’a finalement montré la valeur qu’il pouvait y avoir derrière le fait de prendre soin.
J’ai pris ça de cette relation et je l’ai amené dans ma relation actuelle. Je le fais également avec mes filles, avec les gens que j’aime. J’essaie, du mieux que je peux, de prendre soin de l’autre.
Je n’y arrive pas encore tout le temps. Je peux blesser celles et ceux que j’aime, je vois bien à quel point c’est encore un long chemin pour moi, à quel point ça n’est pas un réflexe, à quel point par certains aspects et à certains moments je suis égocentré, à quel point j’ai parfois envie de mordre en retour quand je me sens agressé, à quel point on est vraiment élevés pour être des connards, nous les mecs — ou en tout cas, la plupart des mecs.
J’avais parlé dans le Fab & Mymy Show de ma relation avec ma petite sœur et comment je l’ai trop longtemps négligée et n’ai jamais vraiment investi notre relation.
Je trouve que cet exemple illustre tellement bien comment j’ai appris à prendre soin en tant que p’tit gars né dans le Nord de la France fin 70s, l’aîné d’une fratrie de 3. Dur constat.
Bref… tiens d’ailleurs d’écrire Bref, ça me fait penser à Bref. Pas facile de se rendre compte que t’es le mec du film. Je comprends que beaucoup de femmes soient en colère contre ces mecs qui ne veulent pas prendre soin, mais vraiment, faut se rendre compte d’à quel point on part de loin 🫠
C’est pas pour les excuser du tout, juste : un constat que je fais, quand je regarde en arrière, jme dis “haaaa ué, c’était un sacré ride pour en arriver là”.
Une prochaine fois, je te parlerai de cette femme qui déteste tellement les hommes qu’elle a décidé de faire un projet avec eux et pour eux.
Pour la première fois à 30 ans et quelques, elle a eu des discussions profondes et sincères avec des mecs, et elle s’est rendue compte de la violence que ces gars vivaient.
Une autre forme de violence qu’elle a vécue et qu’elle vit en tant que jeune femme, mais de la violence malgré tout. J’avais trouvé ça tellement beau, cette démarche d’ouverture. Je t’en reparlerai en temps voulu et en attendant, si ça t’intéresse, tu peux aller écouter Histoires de Mecs ou Histoires de Darons, ça en parle pas mal.
Allez, des bisous et si t’es un mec, viens me raconter dans les commentaires ce que ça t’évoque de prendre soin. Ça m’intéresse tellement.
La bise !
Fabrice
Mon chéri a grandi avec un handicap et par conséquent en mère "au foyer" qui s'occupait de lui à temps plein. C'est peut-être cette situation particulière qui en fait un homme qui prend soin (et surtout hyper organisé, attention à moi si j'ose quitter la maison dans chargeur de téléphone ni Doliprane... "On sait jamais").
Je me repose vraiment sur lui pour tout ce qui est médical, petits bobos, assurance et compagnie.
Et de part sa santé fragile, il a eu majoritairement des amiEs... Parce qu'évidemment les garçons c'est souvent méchant avec les plus "faibles". Du coup on part sur une empathie intéressante.
Idem pour mon père qui a été élevé entouré de femmes. Je me demande si les petits garçons dont on prend soin finissent par imiter les femmes autour d'eux si on ne leur dit pas qu'ils doivent être différents de ce modèle.
Bref, encore une newsletter passionnante ! Merci à toi !